Au début d’avril, 2015, je suis retournée en France, pour tenter de trouver des réponses aux trois pages de questions que j’avais encore, malgré plusieurs années de recherches sur la vie de mon ancêtre Jeanne et de ses trois époux et sur l’histoire de la France et de la Nouvelle-France de cette époque.
Voici quelques-unes des questions contenues dans cette liste :
- Qu’a fait Jeanne durant les 28 premières années de sa vie en France? Quand est-elle devenue orpheline? Comment et pourquoi a-t-elle déménagé de Coutances à Dieppe? Pourquoi a-t-elle quitté la France?
- Pourquoi, comment et quand son premier mari, Guillaume Lecanteur, est-il venu à Québec? À quoi ressemblait sa vie avant qu’il n’émigre et qu’il n’épouse Jeanne?
- Qui était Jean-Baptiste Deschamps de la Bouteillerie, son troisième mari, et de quelle sorte de famille, en France, était-il issu?
- En l’absence de documents, quelles sont les réponses possibles ou les hypothèses les plus susceptibles de répondre à mes questions?
Après un séjour de trois semaines à Rouen, à étudier le français et à faire des recherches dans les archives locales, et après quatre semaines à Dieppe, incluant des visites aux lieux de naissance des trois époux de Jeanne ainsi qu’aux archives de Saint-Lo, qu’ai-je appris?
Pas beaucoup plus, malheureusement. Je n’ai pas appris grand-chose de neuf au sujet de Jeanne, sauf que je demeure convaincue qu’elle n’appartenait pas à une famille de petite noblesse, comme le prétend un historien. Les registres que j’avais espéré trouver concernant le mariage de ses parents et leur décès se sont avérées inexistantes, détruites au fil des siècles par les guerres, la révolution et, possiblement, par les rats et les erreurs humaines. Ces documents auraient pu fournir des renseignements précieux sur la vie de Jeanne, avant qu’elle ne quitte la France, de même que sur les raisons de son départ.
Il manque des renseignements également sur Guillaume Lecanteur. À la mairie de Beaumont-en-Auge, le village où il serait né, on m’a dit que les archives avaient été détruites par les Allemands, quand ils ont envahi la commune au cours de la seconde guerre mondiale. Cependant, des renseignements concernant la naissance de ses sœurs et la mort de son père, en 1661, ont récemment été trouvés dans les archives de Caen. La visite de ces archives devra attendre jusqu’à mon prochain voyage en France.
Le beau côté des choses, c’est que, de façon inattendue, je suis entrée en contact avec quelques personnes qui pourraient me mener à plus de renseignements, dans les prochains mois. Également, j’ai acquis une compréhension plus profonde des alternatives qui s’offraient à une femme célibataire au XVIIe siècle. J’ai aussi pu recueillir plus d’information sur la famille de Jean-Baptiste Deschamps de la Bouteillerie, le troisième mari de Jeanne. J’ai à nouveau rencontré les descendants de son frère, visité le château qui appartient encore à la famille à Offranville, et j’ai aussi examiné leur version de l’arbre généalogique de la famille.
Les recherches de renseignements sur sa famille m’ont amenée au « Pays de Caux », cette région de Haute-Normandie où Jean-Baptiste aussi bien que Robert Lévesque vivaient avant de s’embarquer pour la Nouvelle-France. Mon guide était Jean-Pierre Levêque, peut-être un parent éloigné et ancien maire de Cliponville où Deschamps est né. Nous avons visité les églises et les villages qui faisaient partie du domaine familial, trouvé des trace des armoiries de la famille et rencontré des personnes qui ont effectué des recherches sur l’histoire de la famille.
Finalement, j’ai aussi apprécié l’hospitalité réservée des « Cousins du Nouveau Monde » à Hautot-Saint-Sulpice, le lieu de naissance de Robert Lévesque.
En plus d’avoir savouré ces expériences inoubliables, j’ai réalisé que :
- Ce voyage à la découverte de l’histoire de Jeanne allait être beaucoup plus long que je ne l’avais d’abord cru;
- Il se pourrait que je ne parvienne pas à obtenir des réponses à toutes mes questions ; et
- Il me faudrait me servir de mes recherches sur l’histoire de l’époque et user de mon imagination pour avancer quelques hypothèses sur la vie de Jeanne en France.
En dépit de ces frustrations et de ces défis, je vais persévérer dans mes recherches. L’histoire de Jeanne doit être racontée!